Mgr Job (Getcha), métropolite de Pisidie, a publié aux éditions Salvator à l’automne 2024 un livre intitulé La Divine Liturgie, les cieux sur la terre. Au sein de la collection « Voix de l’Orthodoxie », et ouvrage est une récapitulation des connaissances actuelles dans l’étude de la liturgie eucharistique au sein du rite byzantin, à la fois dans son développement historique et dans le discours mystagogique qu’ont développé les grands spirituels byzantins à son sujet.
Après son manuel de liturgie byzantine, intitulé Le Typikon décrypté, qui ne traitait pas de la liturgie eucharistique, l’auteur revient sur ce sujet en détail, détaillant pour chaque étape de son déroulé son sens originel et son interprétation symbolique à travers l’histoire de l’Église. Il fait notamment ressortir le caractère pédagogique de la célébration, par lequel les fidèles, conduits à la communion au saint Corps et au précieux Sang du Seigneur, font l’expérience de la présence du Royaume des Cieux sur cette terre.
Nous en proposons ici un passage situé au début du livre, dans la partie intitulée « En quête du Royaume de Dieu », qui explore le sens du début de la liturgie, la bénédiction initiale et la grande litanie de paix.
La Divine Liturgie débute par la bénédiction initiale : « Béni est le Royaume du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, maintenant et toujours et aux siècles des siècles », qui indique la perspective de la célébration : celle de manifester le Royaume de Dieu. Il s’agit d’une glorification, car comme le note saint Nicolas Cabasilas, « la doxologie tient la première place dans nos entretiens avec Dieu ; c’est pourquoi avant toute prière et avant la sainte liturgie, le prêtre glorifie Dieu ».
Le diacre invite l’assemblée à prier pour diverses personnes et diverses intentions dans ce que l’on appelle la grande synaptie. Ce terme grec (συναπτή) signifie « ce qui est joint ou lié ». On désigne par ce terme un nombre de prières mises ensemble, à la suite l’une de l’autre. L’assemblée répond à chacune par « Kyrie eleison ! », ce qui veut dire en grec : « Seigneur, fais-nous miséricorde ! » Selon saint Nicolas Cabasilas, « implorer de Dieu sa miséricorde, c’est demander son Royaume, ce Royaume que le Christ a promis de donner à ceux qui le cherchent, en y ajoutant par surcroît toutes les autres choses dont nous avons besoin ».
Le diacre commence par dire : « En paix prions le Seigneur ! », car comme l’explique Cabasilas, « comme nous ne savons pas que demander pour prier comme il faut […], on nous enseigne ce qui est nécessaire au sujet de la prière ; et d’abord la manière, c’est-à-dire qu’il faut prier en paix ». Le diacre invite ensuite l’assemblée à prier « pour la paix qui vient d’en haut », c’est-à-dire de Dieu, car, affirme Cabasilas, « la paix est un don de Dieu, et [le diacre] nous exhorte à prier Dieu pour l’obtenir », puis « pour la paix du monde entier ». Cabasilas explique que si nous sommes dans la paix, « si nous sommes dans cette disposition, nous pouvons charitablement faire [à Dieu] des demandes pour les autres : non pas seulement pour l’Église, pour l’empire, et pour ceux qui sont à leur tête, pour tous ceux qui se trouvent dans les périls, les adversités, les infortunes, mais simplement pour tous ceux du monde tout entier ». C’est pourquoi le diacre invite ensuite l’assemblée à prier pour l’église et « ceux qui y entrent avec foi, piété et crainte de Dieu », pour l’évêque de l’éparchie, pour les autorités civiles, « pour des saisons clémentes, et l’abondance des fruits de la terre et des temps de paix », pour les voyageurs, les malades, les prisonniers, et « pour être préservés de toute tribulation, colère, péril et nécessité ».
Après l’ecphonèse du prêtre, c’est-à-dire la doxologie qui conclut la grande synaptie, l’assemblée répond : « Amen ». Comme le note saint Nicolas Cabasilas, « dès que le prêtre a prononcé cette doxologie, tous les fidèles ajoutent “amen”, et par cette seule acclamation, ils s’approprient toutes les formules du prêtre ».
Il est important de souligner que les fidèles qui assistent à la Divine Liturgie ne sont pas des spectateurs passifs, mais des participants actifs.
L’ensemble de la célébration de la Divine Liturgie est en fait un dialogue entre d’une part le célébrant principal – que ce soit l’évêque ou un prêtre – et le diacre, et d’autre part les fidèles qui répondent eux-mêmes – ou les chantres ou la chorale, qui répondent en leur nom. C’est pourquoi la participation des fidèles à la Divine Liturgie doit être une participation active, attentive et consciente.
Métropolite Job de Pisidie
Job (Getcha) est le métropolite de Pisidie du Patriarcat œcuménique de Constantinople et réside à Antalya (Turquie). Docteur habilité en théologie, il enseigne la théologie liturgique à l’Institut Catholique de Paris. Il est aussi le co-président de la Commission mixte internationale pour le dialogue théologique entre l’Église catholique romaine et l’Église orthodoxe et le vice-modérateur de la Commission Foi et Constitution du Conseil œcuménique des Églises. Il est l’auteur de nombreux articles de liturgie, patrologie, spiritualité et œcuménisme.
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