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La Nativité de la Mère de Dieu

La Nativité de la Mère de Dieu, comme son entrée au Temple, comme sa Dormition, est une des fêtes qui nous viennent non pas des Évangiles mais du « Protévangile de Jacques », donc, des écrits dits apocryphes. Ces fêtes sont par conséquent plus théologiques qu’historiques. « Théologique » signifie ici une contemplation, une vénération de la place de la Mère de Dieu dans notre conception du salut. Or, dans notre Tradition orthodoxe, tout ce qui concerne la Mère de Dieu est inséparable de ce qui concerne le Christ. Pour parler en termes « scolaires », notre Mariologie est christologique. Il suffit pour s’en convaincre de relire les stichères ou les tropaires qui concluent une série comme les stichères du lucernaire aux Vêpres par exemple et qui sont toujours consacrés à la Mère de Dieu, précisément comme Mère du Christ.

La Vierge Marie, dès sa naissance, a été choisie par Dieu en vue de l’Incarnation de la Deuxième Personne de la Sainte Trinité. Cependant, même si elle a été choisie, lorsque l’Archange Gabriel vient lui annoncer la Bonne Nouvelle au moment de l’Annonciation, on constate une fois de plus que Dieu a créé l’être humain libre. La Tradition orthodoxe rejette le dogme catholique romain de l’Immaculée Conception selon lequel la Vierge aurait été conçue en dehors de l’humanité entachée par la chute d’Adam et Ève. Remarquons que saint Thomas d’Aquin non plus n’accepte pas cette doctrine et confesse comme les Orthodoxes que la Vierge Marie fait vraiment partie de l’humanité. 

Au moment de l’Annonciation, c’est librement que Marie accepte de devenir la Mère de Dieu. Et c’est au nom de l’humanité tout entière qu’elle dit : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta parole » (Lc 1, 38). Le Christ, en devenant homme, récapitule toute l’humanité. La Vierge, en acceptant l’Incarnation, récapitule elle aussi l’humanité par sa foi. C’est pourquoi on l’appelle « la Mère des croyants ». 

L’un des Pères de l’Eglise [cette fois ce n’est pas St Grégoire de Nazianze !], Saint Nicolas Cabasilas, au quatorzième siècle dit dans un sermon le jour de l’Annonciation : « L’Incarnation fut non seulement l’œuvre du Père, de Sa Vertu et de Son Esprit, mais aussi l’œuvre de la volonté et de la foi de la Vierge. Sans le consentement de l’Immaculée, sans le concours de la foi, ce dessein était aussi irréalisable que sans l’intervention des Trois Personnes divines Elles-mêmes. Ce n’est qu’après l’avoir instruite et persuadée, que Dieu la prend pour Mère et lui emprunte la chair qu’elle veut bien Lui prêter. De même qu’Il S’incarnait volontairement, de même voulait-Il que sa Mère L’enfantât librement, et de son plein gré ».

Nous apercevons à travers cette citation la fameuse autre expression évangélique : « Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné Son Fils, l’Unique Engendré, afin que quiconque croit en Lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle » (Jn 3, 16). La première parmi ceux qui croient en Lui, est Sa Très Sainte Mère, comme le dit Jésus de manière discrète : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et l’observent » (Lc 11, 28).

L’Epitre pour la Mère de Dieu, Philippiens 2, nous dit que Jésus s’est fait homme en se dépouillant de sa gloire divine et prenant la condition d’esclave qui « accepte la mort et la mort sur une croix » et pour cette raison « Dieu L’a souverainement exalté », allusion à l’Ascension qui place l’humanité déifiée à la droite de Dieu le Père. De là, pour nous l’importance de cette rencontre de la Nativité de la Mère de Dieu et du Dimanche avant la Croix, cette Croix qui est victoire sur la mort et dont nous fêterons l’Exaltation dans quelques jours.

Par la force de cette Croix et les prières de la Très Sainte Mère de Dieu, que le Seigneur Jésus Christ nous sauve. Amen.

Adaptation d’une homélie prononcée en 2008 à la paroisse Notre-Dame-Joie-des-Affligés-Sainte-Geneviève, à Paris. 

P. Nicolas Lossky (+)

Le p. Nicolas Lossky (1929-2017) fut professeur de civilisation britannique à Paris X – Nanterre, professeur d’histoire de l’Église occidentale à l’Institut Saint-Serge et membre actif au Conseil Oecuménique des Églises.

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